
Mes chers amis,
Nous poursuivons notre route vers une virilité enracinée dans la sagesse divine, et il nous faut aujourd’hui aborder une réalité souvent mal comprise, pourtant essentielle : l’ascèse. À une époque où la liberté est vantée comme l’absence de contraintes, où la satisfaction immédiate est devenue la norme, la discipline de soi peut paraître une aberration. Pourtant, mes amis, il n’est de vraie liberté que dans la maîtrise de soi.
Corps et âme, amis ou ennemis ?
Les Pères du désert disaient que l’homme est un champ de bataille où l’esprit et le corps s’affrontent, non en ennemis jurés, mais comme deux forces appelées à s’harmoniser. La sagesse antique et la doctrine chrétienne le rappellent : le corps n’est pas mauvais en soi, il est un don de Dieu. Mais ce corps, marqué par le péché, a ses propres exigences, ses révoltes, ses excès. Tantôt il est un tyran qui réclame sans cesse de nouveaux plaisirs, tantôt il est un esclave brisé par les abus que nous lui imposons.
Que faire alors ? L’ascèse ne consiste pas à détruire le corps ni à s’en méfier, mais à l’ordonner, à lui rendre sa place. L’homme libre n’est pas celui qui cède à toutes ses envies, mais celui qui, par la discipline, fait de son corps un serviteur de son être. L’homme libre est toujours juste, c’est-à-dire ajusté ! Saint Paul l’affirmait avec force : « Je traite durement mon corps et je le tiens assujetti, de peur d’être moi-même disqualifié après avoir prêché aux autres. » (1 Corinthiens 9, 27)
Le jeûne et la tempérance
L’ascèse s’apprend par de petits renoncements quotidiens qui nous rendent plus forts. Parmi eux, le jeûne et la tempérance sont des armes précieuses.
Le jeûne, pratiqué depuis les premiers temps du christianisme, est bien plus qu’une simple privation alimentaire. Il est un exorcisme contre l’esclavage des désirs. Il rétablit en nous un ordre perdu : il nous apprend que nous ne vivons pas seulement de pain, que l’homme ne doit pas être régi par son ventre, mais par son esprit. En refusant volontairement une nourriture légitime, nous affermissons notre volonté, nous redonnons à notre esprit l’ascendant sur notre chair.
Mais le jeûne ne concerne pas seulement la nourriture. Il y a un jeûne des paroles inutiles, des distractions futiles, des regards désordonnés. En nous privant de ce qui n’est pas nécessaire, nous affinons notre intelligence et clarifions nos désirs.
Quant à la tempérance, elle est cette maîtrise douce et constante qui empêche tout excès. Manger, boire, se reposer, travailler, s’amuser, tout cela est bon. Mais quand ces plaisirs deviennent une fin en soi, ils nous corrompent. L’homme tempérant sait profiter des biens de ce monde sans en devenir l’esclave. Il sait dire non à la deuxième coupe de vin, au confort superflu, aux plaisirs qui l’éloignent de sa mission.
L’ascèse, chemin de virilité
Il y a, dans l’effort ascétique, une noblesse oubliée. Dans un monde où tout nous pousse à la mollesse, où la moindre frustration est perçue comme une injustice, celui qui sait se priver devient un roc. Il devient un homme.
L’ascèse forge la virilité, car elle enseigne l’endurance, le dépassement de soi et la capacité à supporter l’effort sans plainte. Le véritable homme n’est pas celui qui cède au moindre de ses désirs, mais celui qui sait les ordonner à un but plus grand. Regardez les athlètes : ils privent leur corps pour l’entraîner à la victoire. Ainsi en est-il de l’homme chrétien, qui s’exerce à dominer ses passions pour mieux aimer.
La virilité véritable ne se mesure pas à la force brute, mais à la force de caractère, à la capacité d’endurer l’effort, de supporter la frustration sans faiblir. Celui qui ne sait pas se maîtriser devient esclave de ses propres pulsions et, loin d’être libre, il se trouve enchaîné à ses caprices. La liberté ne consiste pas à faire ce que l’on veut, mais à vouloir ce qui est juste et bon.
Notre époque manque d’hommes capables de renoncer. Or, comment aimer si l’on ne sait pas renoncer ? Le père de famille qui se lève la nuit pour veiller son enfant malade avec douceur, l’époux qui renonce à un projet personnel pour être auprès de sa femme et se mettre à son service dans ses projets à elle, l’ami qui choisit la vérité pleine de charité plutôt que la flatterie facile assortie de petits mensonges, tous ceux-là pratiquent une ascèse. Ils exercent leur force d’âme.
L’ascèse enseigne aussi la patience et l’humilité. L’homme qui s’entraîne dans l’effort apprend à accueillir la difficulté sans révolte, à accepter la douleur sans désespoir. Il sait que l’épreuve façonne son âme et lui permet de grandir en vertu. C’est pourquoi les grands saints, de saint François d’Assise à saint Ignace de Loyola, ont toujours vu dans l’ascèse un chemin de liberté et de joie.
Enfin, l’ascèse prépare à l’ultime combat : celui du don de soi. L’homme qui a appris à se priver dans les petites choses sera prêt, le moment venu, à offrir sa vie par amour. Il ne craindra ni la souffrance ni le sacrifice, car il aura déjà vaincu en lui-même la peur de manquer. Ainsi, l’ascèse n’est pas une fin, mais un moyen d’atteindre la grandeur du cœur et la noblesse de l’être.
Un défi pour cette semaine
- Pratiquez un jeûne volontaire : un repas sauté, un renoncement à une habitude confortable. Faites-le en offrande, et non comme un simple exercice de volonté.
- Identifiez un domaine où la tempérance vous manque : alimentation, temps d’écran, parole, et mettez-vous une règle simple à suivre.
- Observez votre relation au confort : êtes-vous capable de supporter un inconfort sans vous plaindre ?
Mes amis, l’ascèse n’est pas une pratique d’un autre temps. Elle est la forge des vrais hommes. Elle nous libère de nos passions, nous rend disponibles pour Dieu et pour nos frères. Que cette semaine soit une école de force et de joie, dans la lumière du Christ qui, le premier, a jeûné et s’est offert tout entier pour nous.
Fraternellement vôtre
Dr X.Y.
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