
Mes chers amis,
Nous avons entrepris un chemin où l’homme retrouve sa véritable stature en imitant le Christ. Après avoir exploré le combat spirituel et la nécessité d’une autorité juste, nous entrons à présent dans une étape décisive : la relation à soi-même. Car comment gouverner un foyer, défendre la vérité ou mener un combat juste si nous ne savons pas d’abord nous gouverner nous-mêmes ?
L’homme véritable est celui qui se connaît, non pour s’enfermer dans l’analyse stérile de son propre être, mais pour mieux se donner. « Connais-toi toi-même », disaient les Anciens. Mais que vaut cette connaissance si elle ne conduit pas à l’amour et au service ? Voilà pourquoi il nous faut scruter les profondeurs de notre âme avec une lucidité sans complaisance et un cœur prêt à s’élever.
La sagesse des Pères du désert
Si nous voulons apprendre l’art de la maîtrise de soi, il nous faut nous tourner vers ceux qui ont arpenté les sentiers arides de l’âme avec un courage inébranlable : les Pères du désert. Ces hommes, retirés du monde, n’ont pas fui la réalité ; ils l’ont affrontée dans ce qu’elle a de plus redoutable : eux-mêmes. Ils ont compris que le premier combat ne se livre pas contre des ennemis extérieurs, mais contre les passions désordonnées, les illusions de l’ego, les compromissions du cœur.
Saint Antoine, père des moines, passera des années en solitude avant d’enseigner aux autres. Pourquoi ? Parce qu’il savait que l’ennemi le plus subtil n’est pas celui qui nous attaque de front, mais celui qui se cache en nous : la peur de la vérité sur nous-mêmes, l’attachement à nos propres désirs, l’orgueil qui nous empêche de voir notre petitesse.
L’homme moderne fuit la solitude car elle lui renvoie son propre reflet. Il s’étourdit d’activités, de divertissements, de bruit, de lumières artificielles. Mais le véritable homme n’a pas peur du silence. Il sait s’arrêter pour écouter ce que Dieu murmure à son âme. Il sait faire taire les bavardages du monde pour discerner l’essentiel.
Les Pères du désert nous enseignent donc une première leçon : celui qui veut être maître de lui-même doit s’affronter lui-même. Il ne peut fuir éternellement.
Connais-toi toi-même pour mieux aimer
Se connaître ne consiste pas à s’examiner sous toutes les coutures pour flatter son amour-propre ou se désoler de ses faiblesses. Se connaître, c’est comprendre ses forces et ses fragilités pour mieux s’offrir aux autres.
Un homme qui ignore ses propres failles deviendra un tyran, car il projettera ses angoisses sur les autres. Il exigera d’eux ce qu’il ne sait pas s’imposer à lui-même. Au contraire, celui qui se sait vulnérable devient plus humble, plus juste, plus compatissant.
Cela ne signifie pas qu’il doive se complaire dans ses défauts. L’homme chrétien est en perpétuelle ascension. Il n’accepte pas la médiocrité sous prétexte qu’il est faible. Il la combat avec courage.
Prenons un exemple concret. Supposons qu’un homme se sache enclin à la colère. Il peut soit la nier et la laisser éclater au détriment de son épouse, de ses enfants, de ses frères, soit l’affronter et la discipliner. Il peut transformer cette fougue en zèle pour le bien, en force protectrice, en énergie créatrice. La colère, maîtrisée et purifiée, devient une ardeur au service de la justice. Il en va de même pour toutes les passions humaines : elles ne sont pas mauvaises en soi, mais doivent être ordonnées, rectifiées, offertes à Dieu pour devenir fécondes.
Enfin, se connaître, c’est aussi apprendre à discerner ses véritables désirs. Trop souvent, nous nous agitons vers des buts qui ne sont pas les nôtres. Nous poursuivons des chimères imposées par le monde : succès éphémère, reconnaissance sociale, plaisirs faciles. Mais l’homme qui se connaît vraiment sait ce à quoi il est appelé. Il ne se laisse pas distraire par des aspirations empruntées. Il avance avec résolution vers sa mission propre.
L’art de la maîtrise de soi : quelques principes
Se connaître, c’est bien. Se maîtriser, c’est mieux. Car à quoi bon voir son âme avec lucidité si c’est pour la laisser livrée à tous les vents ?
Voici quelques principes pour avancer :
- L’habitude du silence : Chaque jour, prenez un temps pour vous retrouver seul, sans distraction, sans bruit. Ce face-à-face avec vous-même et avec Dieu est nécessaire pour clarifier votre esprit et apaiser vos passions.
- La discipline du corps : Un homme qui se laisse dominer par son corps n’est pas libre. Le sport, le jeûne, une alimentation maîtrisée sont autant d’exercices qui enseignent à l’âme la discipline.
- L’ascèse du désir : Apprenez à renoncer, non par moralisme, mais par amour. Dire non à une tentation, à un excès, à une facilité, c’est affirmer votre liberté intérieure.
- La relecture de vie : Chaque soir, examinez votre journée. Où avez-vous été maître de vous-même ? Où avez-vous failli ? Cette habitude vous rendra attentif à votre propre progression.
- L’amitié vraie : Un homme ne se connaît pas pleinement sans le regard de ses frères. Choisissez des amis qui vous élèvent, qui vous rappellent à l’ordre quand vous vous égarez.
Un défi pour cette semaine
- Trouvez un moment de solitude véritable et affrontez-vous vous-même. Quelles sont vos principales faiblesses ? Quels sont les désirs qui vous agitent ?
- Exercez un renoncement volontaire cette semaine. Choisissez un plaisir légitime auquel vous renoncerez, non pour souffrir, mais pour affermir votre volonté.
- Méditez sur une parole des Pères du désert (par exemple Recueil d’apophtegmes des Pères du désert traduit du grec en latin par le bienheureux Paschase) et demandez au Christ la force de vous gouverner avec sagesse.
Mes frères, la vraie virilité commence par une conquête intérieure. Tant d’hommes rêvent de grandes batailles, mais négligent celles qui se jouent dans le secret de leur âme. Soyez maîtres de vous-mêmes et vous serez libres. C’est alors que vous pourrez aimer en vérité et servir avec grandeur.
Que le Christ vous guide dans cette noble ascension.
Fraternellement vôtre
Dr X.Y.
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